Larousse - Vieillesse
: le dernier âge de la vie - Conformisme : respect de la morale en usage…
La morale en usage actuellement veut que l’on se conforme aux canons de la psychanalyse, qui se targue de tout savoir arranger et guérir, alors, plus de vieux, plus de vieillesse, plus de tordus et de malades : les anciens voyagent, sortent, dansent, bouffent, et pourtant un sort imprévisible dans le temps, mais inéluctable les attend. Ce sort inéluctable existe depuis que les hommes sont sur la terre et heureusement il existera toujours : il arrive un moment ou l’on est un peu fatigué de cette gabegie universelle et ou l’on aspire à un peu de repos. Le conformisme actuel veut que l’on cache la mort, et de ce fait que l’on cache les vieux qui la rappelle constamment, je crois que c’est un mauvais chemin et qu’il faut reprendre la bonne habitude de nos ancêtres : se préparer tranquillement à mourir.
Tout est échec et vanité dans
une vie d’homme, réussite sociale, argent, possessions matérielles diverses,
tout est échec sauf l’amour : l’amour des autres ; l’amour de la vie ; l’amour
en couple par le cœur et par le sexe ; et l’amour de soi tel qu’on est. Après
le constat d’échec, il y a ce que dit Marcel Légaut
" il y faut semble-t-il, une nouvelle découverte, qui, après celle de l’amour et de la paternité, achève le cycle qui conduit l’homme à une conscience capable d’éternité. A l’horizon de la lucidité humaine doit se lever la mort, lentement, comme un astre solennel. Sa mort à soi et non point celle des autres. Cette mort en vérité inimaginable, mais dont la pensée est désormais présente quotidiennement à l’arrière plan de la vie, toute prête à surgir au moindre indice de quelque danger. Sans cesse, elle attire tout à elle, pour lui donner son sens et rien que son sens. Savoir d’une connaissance concrète immédiate, journalière, qu’on mourra, cela simplifie et libère, si cela ne paralyse et ne désespère pas. L’échelle des valeurs avec laquelle on juge est bouleversée. Chaque chose se met à sa place exacte et presque sans effort . Ce qui paraissait capital devient parfois accessoire et s’oublie comme un passé révolu, étranger. Mais le précieux de l’existence apparaît alors sous toute la joaillerie qui a paru longtemps en faire la valeur. Bienheureux celui qui, bien avant son crépuscule, l’avait déjà entrevu ! HO ! N’être rien, mais seulement être ! Marcel Légaut Extrait de " Travail de la foi "
Vieillir c’est mourir un peu, mais un tout petit peu seulement à la fois, aussi, il faut à une certaine période de la vie, disons vers la soixantaine, faire un peu le point et revoir peut-être sa façon de vivre et de voir les choses. Cela ne veut pas dire abandonner et se laisser aller, non, pas du tout, il s’agit de faire le tri entre ce qui est vraiment important et tout ce qui est gadget et inutile.
Personnellement cela m’est venu comme ça, sans me faire la grosse tête et sans aucune morbidité obsessionnelle, d’une part parce que je franchissais la barre des soixante berges et d’autre part du fait de la disparition presque simultanée de mes deux frères aînés . Etant un vieux lecteur assez chanceux, je me suis mis à chercher et fouiner un peu partout pour trouver des livres et des essais concernant la vieillesse et la mort, j’ai lu un peu de tout et de toutes origines, aussi bien philosophiques que religieuses, j’ai pris des notes que je relisais et méditais, et me suis constitué une petite bibliothèque que je consulte régulièrement pour me rafraîchir la mémoire :
· " La mort d’Ivan Illitch " de Léon Tolstoï
· " Attente de Dieu " de Simone Weil
· " La Vieillesse " de Simone de Beauvoir
· " Un Itinéraire " de Marie-Madeleine Davy
· " L’homme devant la mort " de Philippe Ariès
· " Naissance de la vieillesse " de Claude Olievenstein
Et accessoirement des plongées dans la Bible, le Coran, la Bhagavad-Gîtâ, l’histoire des Grands Saints, des Prophètes et des grands philosophes d’Occident et d’Orient.
J’avais devant moi, d’une part, un éventaire de visions très réalistes et assez brutales de la vieillesse et de la mort dans différentes civilisations, et de l’autre des visions mystiques pour le moins consolantes, qui m’ont confortées dans ma conception d’une seconde vie transcendantale.
En parallèle à ces lectures édifiantes, j’ai aussi lu pas mal d’ouvrages sur la diététique, l’hygiène de vie des gens vieillissants, la pratique du jeûne, les règles à minima à respecter pour se maintenir en forme, tant au niveau du corps que de l’esprit. Là, il m’a été assez facile de prendre quelques résolutions, que beaucoup de sexagénaires pourraient facilement suivre .
Pour ma réflexion sur la mort, sur ma mort, la mienne, pas celle des autres, l’aboutissement a été assez simple et sans complication, un matin je me suis mis à genoux et j’ai accepté mon sort, j’ai dit " bon, tu as eu une vie assez agitée, pleine d’expériences, tu as eu l’amour, des enfants, des joies et des peines, des réussites et des coups durs, maintenant tu peux raccrocher et voir autre chose, et tout ce que tu vas faire maintenant et jusqu’à ta mort, qui surviendra quand elle voudra, ça sera du boni, un surplus de vie, un cadeau du ciel, une grâce ".
Cette acceptation totale de notre sort inéluctable me donne une joie de vivre quasi permanente, rien qu’en ayant presque entièrement supprimé les futilités proposées et même imposées par notre société matérialiste. Une cogitation bien approfondie de notre fin dernière, au bon moment, donne indubitablement à ceux qui la font une bonne dose de relativité pour juger des choses de ce monde, une vue amusée sur l’agitation effrénée des hommes occidentaux et un regard compatissant et désabusé sur notre propre personne.
Sans être du tout affilié ou drivé par une quelconque confession religieuse, mais éduqué et fidèle à la croyance chrétienne, je crois fortement et totalement à la transcendance, sans me poser aucune question sur le sort qui m’est réservé, ni sur la forme de cette transcendance : il appartiendra à Dieu Seul de me juger pour ce qui est réellement dans mon cœur et ce qui doit advenir adviendra.
Maurice à Gaillac le : 19 mai 2003 mauridub@wanadoo.fr