Voir aussi la lettre (mai 99) de Bernadette :
"Enfants, espérance du Brésil"
Un séjour au Brésil (sep 97)
* Aujourd'hui 12 01 2000 le morceau de canne à sucre rapporté dans mes bagages repousse régulièrement et agrémente mon bureau de travail
Avant le départ
- Thérèse ne croyait pas trop, début juillet, à cette aventure. Une fois décidée, elle a pris en main l'organisation en communication par Internet avec Jean-Philippe qui était sur place.
Le départ
Mardi 2 Septembre, 16 h Tout est prêt. Nous sommes trois : Thérèse, Anne-Marie et moi.
On s'entasse, avec les paquetages, dans la petite Fiat, direction Orly. En plus de nos valises, nous emportons deux énormes sacs chargés de vêtements, de jouets, de médicaments et divers cadeaux à distribuer, pour Bernadette. En guise de soulagement nous prévoyons un retour plus léger. J'étais devenu le "sherpa de ces dames " Heureusement j'avais une petite valise roulante, cadeau, promotion de dernière heure et bienvenue, de Damart, qui m'a permis de charger les autres bagages.
Gérard, avec bonne humeur, nous véhicule dans les encombrements parisiens. Coincé sous les gros sacs à l'arrière de la voiture, je me lance dans l'accomplissement de ma tâche de reporter, alors que nous traversons Paris.
18 h 30 arrivée à Orly Ouest
Arrivés à Orly, je roule Anne-Marie avec l'attirail sur un caddie, alors que Thérèse, avec autorité, prend la direction des opérations au grand étonnement de l'hôtesse du guichet. Dans la bonne humeur, nous suivons le chef qui, en maîtresse femme, fait visiter à Anne-Marie les curiosités de l'aéroport. Pensez donc ! dans une boutique Duty free, on vend des fromages à offrir ! Bien sûr, on ne leur fera pas faire une croisière en bateau, et ils pourront être consommables à l'arrivée ... Denis nous avait raconté ses souvenirs à propos de camemberts qu'il avait reçus après trois mois de traversée.
Décidé à faire une chronique que j'avais annoncée, je voulais passer mes messages par les boîtes Minitel. A mon grand regret, à une exception près, je n'ai pas eu le loisir de contacter les interlocuteurs qui m'attendaient.
* Nous montons à bord de IB 3411Aibus 320, en queue … (qui arrive, d'ailleurs, aussi vite que les places de première, en tête de l'appareil. C'est un bon modèle, dirait Jean C. ! )
20h 30 c'est le décollage. Anne-Marie est très impressionnée, je lui tiens la main en riant pour son baptême de l'air.
Rapidement repus par un repas bon mais sûrement indigeste par l'importance des produits animaux présentés et la quantité de conservateurs qui doivent y être mélangés, nous nous laissons bercer par un "Sirtaki" diffusé dans nos écouteurs. Encore quelques minutes et nous atterrirons à Madrid pour changer d'avion. Nous comptons arriver vers 6 h à Sao-Paulo
22 h 15 arrivée à Madrid
Entracte au DutyFree. Pour se détendre et chahuter, j'asperge Anne-Marie de quelques giclées de différents parfums de démonstration, l'odeur, forte de certains, tenace et désagréable dans le mélange, ne la quittera pas avant l'arrivée, malgré le passage aux toilettes dans l'aéroport et dans l'avion. Gentil bizutage.
Autre détail amusant : au moment de l'envol, l'équipage vous distribue du matériel, jugé sans doute indispensable pour le confort de la nuit. Nous recevons chacun, un oreiller minuscule, une couverture et un petit sachet contenant des objets sans forme, ressemblant à des mouffles. J'ai cherché longtemps l'usage que je pouvais en faire. J'ai su, qu'il s'agissait de chaussettes, taille unique, qui, telles des sacs devaient remplacer les chaussures. En fait, je les ai trouvées si confortables que, même trouées, un mois après, je porte encore celles du retour !
La nuit fut longue sans possibilité de s'allonger pour dormir.
L'avion faisait la course avec le soleil qui n'arrivait pas à gagner. A 10 h à notre montre, l'avion descend, il fait toujours nuit.
Mercredi 3 6 h : arrivée à Sao Paulo.
- A l'aéroport, on prend le temps de s'adapter au changement d'heure. Il faut calculer 5 heures de décalage.
Ces dames fument une cigarette, en faisant leurs commentaires à en oublier de monter dans le bus, je dois les bousculer.
Ce dernier nous fait découvrir le pays. Approximativement, je pourrais me croire à New-Dehli ou à Jaïpur, sans la foule.; dans la banlieue de Montréal pour les voies d'accès. En hiver, en Inde ; au printemps, au Canada.
Après le repas, visite de la favella intra et au-delà de la "route rapide" (viaduc)
-Chez Bernadette
Nous nous installons et sommes gratifiés des dernières informations complétant la chronique du groupe Mandon
L'atelier, Yann, l'école, Christiane, la favella, le viaduc, les nouvelles extensions, rien ne manque.
Les commentaires seraient superflus. Bernadette fait face et ne tarit pas d'explications ; elle ferait un livre si elle en prenait le temps. Elle tient le "cou" un peu trop droit et elle en souffre .
Je suis très admiratif de constater tout ce que je savais déjà sur son action dans cet environnement et dans son implantation ici.
Généreuse, réaliste, elle fait face à tout sans se laisser embarquer par ces gens qui ne mettraient pas longtemps à la dévorer. Elle a parfaitement intégré la langue et non seulement est insérée mais elle exerce une influence, un pouvoir sur les gens qui la côtoient. Elle dit que la violence est présente mais je n'en ai encore constaté aucune trace. S'il y a des agressions, des assassinats, c'est surtout la drogue, parait-il, qui en sont la cause.
Avec elle, dans les rues, nous ne provoquons aucune réaction. Elle s'arrête souvent pour faire signe ou prendre des nouvelles et, en réalité ....elle n'arrête pas.
Je me retrouve interrogé comme je l'ai été en Inde. J'ai rencontré le regard des gens d'ici. Je savais que je n'aurai qu'un petit aperçu de ce monde qui vit en même temps que moi. Quel fourmillement qui ne prend de sens que dans un plan divin ! Privilégié, entouré, connu, reconnu, je sens ma solitude. Elle n'est supportable qu'en temps qu'âme. Alors, les années, le temps, l'espace ne sont rien. Je suis tout, en même temps. Je peux aimer et me sentir relié.
*jeudi 4 visite de SaoPaulo.
- La visite de SP fut pleine d'intérêt. D'un bon pas, Bernadette nous a emmenés à travers la ville. Bus, métro, train, musée des arts artisanaux d'Amérique latine. Elle ne tarit pas d'explications et de récits sur sa vie avec les enfants des rues. Comment ne pas aimer déjà ce pays, cosmopolite, sans passé traditionnel, mais très inséré dans la vie présente.
Logé seul dans le logement de Luc, au-dessus du lieu de méditation, au réveil, je m'imagine passer ici quelques mois, comme en Inde. Je retrouve tout à fait l'atmosphère étrange, le climat, la vitalité de l'Inde.
Ici, c'est vraiment le lieu idéal pour rédiger les "Méditations à la vila Prudente" .
Réveillé alors qu'il faisait encore nuit, je retrouvais, encore bien présents, les souvenirs de mon séjour de trois mois à Jaïpur, dans l'ashram des lépreux. Il manque les singes et les vaches. Ici, c' est propre, alors que là-bas c'étaient surtout les cochons, les poulets, encore les vaches qui faisaient le ménage. Il y a électricité à volonté, douche chaude, toilette et, surtout, un coin aménagé pour méditer. J'y ai fait mes pratiques de yoga dans le calme et je me voyais bien prolonger ce séjour en profitant de l'implantation de Bernadette.
Nous nous attendons à retrouver J-Phi le lendemain.
*vendredi 5
On attend Jean-Phi qui arrive avec Alice, sans voiture, la nuit bien tombée ...
- Plongés dans la vie de la favella, nous observons l'investissement de Bernadette qui intervient sans vouloir privilégier quoi , ou qui que ce soit. Bien sûr, elle a un petit faible pour les enfants de Christiane ; ces derniers lui rendent bien son affection. C'est touchant de voir la relation familiale qui s'est établie. Et pourtant elle sait que les lois locales lui interdisent tout geste qui ressemblerait à de l'appropriation. Elle ne peut sortir les enfants sans l'autorisation des parents visée par le juge.
La grande force de Bernadette, c'est sa puissance de contact ainsi que son réalisme et son dynamisme. Elle maîtrise parfaitement la langue et les modes de vie du pays. Elle semble avoir le charisme de mère Teresa sans en avoir le côté médiatique. Elle dit elle-même qu'elle est très structurée ; sa forte personnalité laisse sans doute peu de place aux caractères faibles. On est assisté ou on fuit ; c'est ce que je fais souvent pour écrire.
Jean-Philippe ayant égaré le numéro de téléphone de Bernadette, ( il avait besoin de ce numéro pour nous retrouver ), il a passé sa matinée du vendredi à appeler, en France, pour tenter, sans succès, de l'obtenir. Ses amis de Araraquera ont fini par le joindre et le lui donner.
* Samedi 6 départ pour Rio.
Taxi jusqu'à la gare routière, puis, sans attendre, 5 heures de car avec un arrêt d'une 1/2 heure pour se sustenter.
Nous logeons à l'Auberge de Jeunesse, joliment située sur une place calme à Copacabana.
On rate le coucher du soleil au Pain de Sucre pour avoir attendu le bus (511) une 1/2 heure. Dîner au restaurant de l'autre côté de Flamengo, après une heure de marche.
A Rio
Comme des mouches sur le fromage, nous nous précipitons sur le Pain de Sucre. Cherchant à éviter le côté touristique, j'apprécie d'y monter de nuit. Anne-Marie, en extase devant cet horrible phallus ....me fait imaginer qu'elle vit une projection alors qu'elle a quelques ennuis sur le plan physique.
C'est au "café Lama" que Thérèse a eu beaucoup de plaisir à s'asseoir pour reposer ses genoux. Elle demande à Anne-Marie quelques oignons de sa garniture ... elle mangeait du poisson ! Pour moi, j'ai demandé des bananes frites. Que d'images évocatrices !
Dimanche 7
- Le séjour à Rio, très attendu, n'est pas évident à organiser. Nos demandes sont bien différentes. Pour moi, je n'ai guère de goût pour le tourisme. Thérèse ne veut pas rater ce qu'il faut voir. Anne-Marie est prête à suivre n'importe qui, n'importe où et se satisfait de tout.
J-Phi, en trompe l'oeil, fait le choix de plaire à Alice. J'en suis au point où le voyage perd son sens.
Ce matin, je préfère rester seul, pratiquer du yoga, attendre J-Phi et Alice plutôt que d'aller visiter le centre ville de Rio avec "mes femmes". Puis, nous déambulons dans le centre ville, centre des affaires. On est dimanche, la ville est morte..
En se courant après, nous avons fait le Corcovado. C'est tout de même plus pittoresque que le Pain de Sucre. Je n'arrive pas à m'extasier sur ces sites éculés par le passage de millions de touristes. Je préfère les paysages poétiques de la bonne vieille France.
Un petit tour sur le marché au pied de l'hôtel auberge de jeunesse nous immerge dans l'exotisme. Bananes, mangues, papayes, épices, poisson cru, nous avons le choix. Thérèse nous a acheté de quoi faire un bon petit-déjeuner. Seul, le thé en sachet trouvé dans la sacoche de voyage de mes soeurs laissait à désirer. Il avait dû faire de nombreux voyages, pendant des années avant d'aboutir dans notre tasse.
Cela a été l'occasion pour Thérèse de passer une partie de sa mauvaise humeur sur mon dos : J'ose émettre quelques appréciations sur ses choix, ou je ne réponds pas favorablement à ses questions. Il faut avoir une idée précise du nombre de tartelettes que l'on prendra à partir de l'affiche d'un restaurant. C'est un Bélier fonceur qui traine son frère, Poisson cancer.
Lundi 8
- De bon matin, nous allons sur la plage Peu de monde encore, soleil. L'eau est bonne ; je prends mes deux premiers bains encadrant une bonne séance de yoga.
C'est la dolce vita, le coin des gens en vacances.
*Après un deuxième échec (le premier ayant eu lieu à Sao Paulo), on tergiverse entre les transports en commun ou une location plus chère chez Hertz. C'est cette dernière solution qui l'emporte. et on quitte Rio à 15 h passées vers le sud en admirant les célèbres plages :
Ipamena, Leblon. On aperçoit la fameuse favella Rocinha accrochée sur les pentes des montagnes.
Arrivés de nuit à Angra dos Reis (l'anse des rois), on trouve rapidement un hôtel pas cher (25 + 35 réals pour une chambre avec un grand lit et une chambre avec 3 lits).
Courte ballade "en ville" qui se termine dans le restaurant "au poids" (salades, viande, bananes frites), en face de l'hôtel, et une engueulade avec Alice qui "n'aime pas être traitée en petite fille ..."
-Craignant l'une et redoutant l'autre, J-Phi a des difficultés à contenter sa copine Alice et Thérèse. Il est sur le point de se faire déborder, mais la tempête s'apaise et nous nous retrouvons le soir à 150 kms de Rio, dans un petit hôtel d'un pittoresque port de pêche, à Angra dos Reis.
mardi 9
*Après le petit déjeuner "en chambre", grâce au chauffe-eau branché depuis 6 heures, et le yoga de Marc, promenade au port de pêche où l'on s'intéresse au déchargement des sardines. Puis, en attendant les jeunes qui en sont à leur petit déjeuner (à prendre au bar d'un hôtel !), on fait quelques courses : pain et fruits
départ vers le sud
en suivant la côte au plus près à la recherche d'une plage sauvage. Une route de terre y mène. Bain, pique-nique, re-bain dans le calme le plus complet : pas de vent, pas de vagues, mais grosse chaleur (35°). On rejoint la route normale qui permet d'admirer le paysage : succession de montagnes et de plages bordées de cocotiers.
Arrêt à la tombée de la nuit à Tarituba, charmant village de pêcheurs, où l'on boit une bière.
De nuit on continue la route. On dépasse Parati pour arriver à Ubatuba, station balnéaire pour Paulistins. On est logé dans un appartement de 4 pièces dans un immeuble bien gardé.
- Une promenade sur le port pour voir débarquer des sardines. Nous admirons le dynamisme de la pêche artisanale. Je n'ai pas encore sorti mon appareil de photo, écrit aucune carte, envoyé aucun message. C'est mon style cette année. Je regarde et je réfléchis.
Nous nous interrogeons sur les réunions de Pentecôtistes qui semblent utiliser le bruit et la transe pour obtenir les faveurs du ciel. Pourquoi pas ? Au milieu des bananes, des cocotiers et de la poussière des voitures et des camions, c'est très couleur locale.
Le guide que Thérèse sort régulièrement de son sac nous donne les indications nécessaires, mais reste très loin de l'ambiance que nous trouvons.
Nous passons la journée au calme sur une petite plage déserte. Nous y sommes arrivés , un peu au hasard, l'eau était chaude, stagnante, nous y avons mariné tranquillement alors que Thérèse faisait du yoga consciencieusement.
*mercredi 10 Parati ou Paraty ?
Arrivés à 13 h, on se lance à la découverte des ruelles pavées et piétonnes en se dirigeant vers le port. Peu de vie à cette époque de l'année ... . Déjeuner de poisson sur le port, promenade sur la jetée et retour.
C'est la prison transformée en office du tourisme qui accapare mon attention. Les rues sont pavées de gros galets irréguliers qui rendent la marche hésitante et les véhicules cahotants. Par grosse marée, que nous n'avons pas vue, la mer monte dans les rues au pied des maisons. Une panne d'électricité donne à notre visite un côté pittoresque, éloigné des habitudes touristiques du lieu.
Au retour, nous nous arrêtons, sur les conseils de notre guide Jean-Philippe, qui semblait bien connaître le pays, pour déguster la cachaça, liqueur à base de canne à sucre. Dans l'euphorie ainsi provoquée, nous remontons en voiture. Une fois rentrés, Anne-Marie, la championne de belote, fait gagner J-Phi, tout heureux. Seul moment du séjour où je fais équipe avec Alice... pour perdre.
jeudi 11
* Pour être à Campinas ce soir et rendre la voiture en temps utile, à quelle heure partir ?
On quitte Ubatuba à 13 h passées en emportant les fruits qui restent et du riz à la mayonnaise. Arrêt sympathique pour grignoter biscuits et chocolat (malheureusement au lait pour Alice qui ne supporte que le chocolat noir, introuvable au Brésil) et boire un café, après avoir gravi la montagne dans les nuages au-dessus de Caraguatatuba.
Arrivée à Campinas la nuit tombée, juste à temps pour rendre la voiture et trouver un hôtel luxueux, le Campinas résidence, chambre 78. Dîner de 3 pizzas différentes, fort bonnes.
- La pluie tombe toute la nuit. Les négociations pour un départ sont difficiles. Petit tour près de la plage à surf.
Pour Thérèse, c'était hier qu'il fallait se baigner. Nous avons donc seulement du bout du pied touché l'eau et pris sa température. Alice consent à partir à 13 h et prend ses dernières photos en arrêtant la voiture. Nous arrivons vers 18 h 30 à Campinas où J-Phi reçoit un dernier cadeau, celui de nous renvoyer à l'hôtel alors qu'il avait envisagé autre chose chez une amie. Eduardo n'est toujours pas visible : il a trouvé du travail. Aura-t-on accès à un ordinateur ?
vendredi 12
Primitivement, c'était la date de notre retour. Nous sommes à l'hôtel *** parmi les riches. Si le personnel abondant est bien payé, je ne regretterai pas la note conséquente de cette incursion imprévue dans ce palace.
J-Phi n'était pas bien hier soir. Il semblait écrasé par les tiraillements divers dont il était le centre. Il doit laisser sa copine Alice à l'aéroport aujourd'hui ; cette dernière aura bien pimenté le séjour d'une façon inattendue. C'était un phénomène dans son genre, une vraie peste. Nous n'avons pas profité de J-Phi comme nous l'aurions pu si elle nous l'avait laissé. Nous attendons de ses nouvelles, prêts à descendre nos bagages en consigne.
Mon souhait aurait été de visiter la fac et de contacter un moment l'ordinateur avant d'embarquer pour Araraquara chez les parents d'Eduardo. Nous n'avons pas encore vu ce dernier.
* On remonte chez Eduardo et on arrive juste à temps pour saluer le départ d'Alice ... sur les chapeaux de roue !
Accueil chaleureux d'Eduardo et de Beth qui nous offrent de l'eau et à déjeuner, puis une promenade à l'université où - enfin ! - on peut transmettre des messages en France via Internet, à la grande satisfaction de Marc. Promenade dans le campus de l'université.
Retour chez Eduardo où l'on attend J-Phi, qui finit par arriver sans savoir les horaires de car pour Araraquara.
Alors, on attend, on attend, ... comme attendent ceux qui nous attendent.
samedi 13
* On a fini par arriver à Araraquara un peu avant minuit. Dans le car, J-Phi est sermonné, ce qui permet de vider le trop plein de rancoeur.
L'accueil des Sperduti est très amical. J-Phi prend une place importante en tant que traducteur.
Celia, la tante d'Eduardo ne demande qu'à parler français.
Visite du centre ville, nombreux jardins, église très simple, bien décorée, ru commerçante ; retour à pied en suivant la rue São Bento.
Repas copieux avec boeuf, poulet, saucisse, légumes, riz, salades.
Visite d'une ferme avec Cida ; elle était institutrice dans l'école d'une grande exploitation de canne à sucre. Elle nous instruit et montre tous les détails de la vie paysanne.
Thérèse, avec une assurance candide, cherche à paraître assurée. Elle est avide de repères et de classifications, de certitudes : "il ne pleut pas beaucoup ici". A contre coeur, elle corrige ses appréciations, dix minutes plus tard, sous des trombes d'eau.
Après le dîner je me décide à accompagner "mes femmes" faire une petite promenade. Embarqués par Celia dans sa petite Chevrolet, nous aboutissons dans son logement, nickel et bien verrouillé.
Un moment, assez long, je me trouve comme une panthère dans sa cage, furieux de m'être laissé piéger. Puis Celia a habité son cadre impeccable et froid. Elle nous montre ses herbes et nous parle d'elle. Je m'intègre, et, quand elle nous prépare une tisane, je vais chercher quelques feuilles de ce que j'ai tenté de reconnaître. Dans la nuit, réveillé par des cauchemars, je les attribue à ces herbes folles et je me lave l'estomac.
dimanche 14
Un tour au marché pour acheter de la pâte de goyave et goûter toutes les confitures et les nouveaux fruits, genre citron. Celia fait un poulet au curry au lieu du coq au vin souhaité par nos hôtes.
Après une courte sieste, promenade dans un luxueux hôtel des environs d'Araraquara pour voir une chute d'eau de 50 mètres. Avant le dîner, promenade au square voisin. Le ciel ne se dégage pas assez pour permettre d'admirer la Croix du Sud, et la nuit, on est cadenassé dans la maison !
- Le petit déjeuner est vraiment très copieux. Gourmand, je veux goûter et reprendre de tout à en être malade. J'ai du mal, ensuite, à me mettre dans une pratique de yoga. Avec J-Phi, plongé dans ses atlas de géographie historique mondiale, nous écoutons Cabrel dont je ne comprends pas le texte.
Nous partons en ville avec Elio qui nous fait connaître son passé en présentant l'évolution de la cité dans laquelle il est né.
Le déjeuner est encore très plantureux et, comme Jean-Phi, je crains de "faire du gras" ( Jean trouve l'expression horrible mais me rassurerait sur le fond... ) . Les nuits sont agitées.
La chaleur nous impose une petite sieste. Je fais un premier bilan du voyage.
Je pense que se révèle bonne mon intuition de n'avoir pas voulu une sorte de "voyage de noces" ici avec Geneviève, mon amie. Avoir fait appel très tôt à Thérèse a entraîné un style que je ne regrette pas. J'espère qu'il en est de même pour elle. Geneviève s'est démobilisée. Anne-Marie a pris la place, une autre expérience.
lundi 15
*La matinée est passée à faire les bagages : un car part à 12 h 20 pour Sao Paulo. On déjeune rapidement et légèrement avant de quitter Cida et Elio. Celia, retenue par son travail auprès des handicapés, n'arrivera pas à temps pour nous embrasser.
-Ca sent le départ. Nous allons quitter Araraquara tout à l'heure et le Brésil mercredi. Mon pantalon est tout blanc, lavé par la fatima de la maison et repassé par Anne-Marie.
Là où nous en sommes :
- J-Phi semble flottant, Thérèse déjà arrivée à son conseil d'administration de jeudi, Anne-Marie en pleine forme.
Dans le bus vers Sao Paulo, je relis mes notes et je les mets en place dans ma tête.
Très fière, Thérèse réussit à nous ramener à la favella en utilisant le bus urbain. Un vrai bonheur de se mélanger à la population jeune et décontractée.
La nuit est plutôt fraîche. Elle nous prépare un retour automnal alors qu'ici on va vers l'été malgré le froid passager.
mardi 16
*Debout dès 7 h. On est prêt à aller acheter des fruits à rapporter en France : mangues, goyave, avocat, fruit de la passion, ananas, noix de coco, mamao, ...
Déjeuner au restaurant au poids à 5 minutes de la favella ; c'est un tout autre quartier, très vivant, tout en restant modeste. Après une sieste (bienvenue), acquisition des objets en bois réalisés par la menuiserie : fleurs, jouets, plateau, etc. On épuise les reals. Les comptes du voyage peuvent être bouclés sans trop de mal (3 reals manquent à l'appel).
- Un dernier tour en ville pour porter des vélos d'enfants à réparer, acheter des fruits et voir, à l'école, le cours de dessin de Michèle. Déjeuner "au poids" avec Bernadette et Yann. Nous sommes tous bien détendus plus qu'avec J-Phi et Alice la semaine passée.
A Bernadette, je dirai que j'ai choisi de venir au Brésil par J-Phi qui en a été l'élément déclencheur. Mon objectif était, je l'ai dit dans mes échanges Internet, de partager la vie de quelques brésiliens, de respirer leur air, afin d'être par eux plus en sympathie avec une autre partie du monde. Si je me suis décidé à me bouger pour J-Phi, rapidement ma préférence est allée vers les favelles et Bernadette. Thérèse et les Marchand ont alors été des agents favorisants importants, essentiels à vrai dire.
mercredi 17
* Dieu caché, Dieu livré, Dieu transpercé. Dieu présent dans le peuple debout,
Que l'Esprit parle à notre esprit, dans le silence. (Chant et prière avec Bernadette.)
Dernier tour dans la favella pour prendre des photos significatives (bar des amis).
Bernadette nous questionne : "Le meilleur moment du voyage ? Le pire ?"
< Anne-Marie a préféré la favella, et moins aimé les angoisses du trajet.
< Thérèse a préféré écouter Bernadette, et détesté les attentes.
< Marc a aimé les temps de silence dans le coin prière de la favella, beaucoup moins les moments de tensions.
- Dans l'avion
Bernadette, avec les trois gamins, nous a accompagnés jusqu'à l'aéroport. Ces derniers ont mis de l'animation dans le hall et, Bernadette, comme d'habitude, a du mal à gérer à la fois ce qu'elle a à dire et l'activité des enfants.
Le passage au-dessus de Sao Paulo est impressionnant. Une ville tentaculaire où les constructions de gratte-ciel, d'immeubles, de "vilas", de favellas, se succèdent sans fin ; hérissée de gratte-ciel, de bureaux, de tour banques, parcourue par des cours d'eau, des égouts à ciel ouvert, où toute vie semble avoir disparu. Une puanteur qui se dirige vers l'ouest, à l'intérieur du pays, pour finalement aboutir à Buenos Aires (par le Parana), après avoir infesté des milliers de kilomètres. Des bus de toutes sortes, des petits marchands de sucos, de la vie, sans grouillement de population comme en Inde.
Nous décollons à 16 h 15 et le but est de rattraper l'heure française qui est de 21 h 15. La nuit va être courte. Bernadette nous a demandé, en guise de bilan, quel a été le meilleur et le pire moment du voyage :
Remarques. Re...Marc. Re...
Les enfants
.Ils sont beaux, bien vivants, dégourdis, capricieux, ils se satisfont, aussi, d'un rien. Ils vivent les uns sur les autres et dorment n'importe où. Bernadette s'occupe d'eux comme s'ils portaient ses espoirs de transformation pour le pays. Elle sait bien qu'ils seront vite pris dans la masse, menacés par l'insécurité, la drogue, les habitudes machistes d'une population en voie de développement.
La société.
Dans ce pays sans grand passé culturel, les ethnies sont bien mélangées ; le racisme ne semble pas exister, et pourtant...Les différenciations se font par le niveau de vie. Il n'y a aucune protection sociale. Nos problèmes de pays riches et de plafonnement des allocations familiales paraissaient minables.
Dans la favelle où nous sommes allés, on constate une organisation et un certain ordre public. Chacun nettoie devant sa porte et fait sécher son linge qui est lessivé à l'eau froide. Les gens sont propres et les habits sont nets. Le réseau de distribution de l'eau et de l'électricité, bien que bricolé est très efficace. Le tout-à-l'égout, couvert, passe au milieu de chaque ruelle. Les habitants bénéficient, pourtant, de certains avantages en nature, l'eau et l'électricité sont gratuites ! Une erreur, un droit, ou une aumône devant un constat d'insufisance de logement décents ?
Une faveur qui entraîne, paradoxalement, une irresponsabilité : on laisse les lumières allumées, pourquoi se restreindre?
Nous avons approché le prolétariat à la favelle et nous avons eu des contacts avec la classe moyenne à Araraquera chez les parents d'Eduardo qui travaillent dans le commerce et l'enseignement. Bien sûr il faut savoir le Portugais pour se faire comprendre ; avec un peu d'habitude on finit par parler avec des signes, ou par écrit car nos mots ont souvent les mêmes souches.
La police.
Elle a mauvaise réputation, dit Bernadette. En semant la terreur dans les favelles c'est le monde de la violence et de la corruption.
Les descentes de police commencent par un survol en hélicoptère et un concert impressionnant de sirènes. Ensuite à coups de matraque des groupes de plusieurs individus se dirigent vers leur objectif. Quand ils coincent un revendeur de drogue, par exemple, en utilisant les dénonciations par la torture, (jusqu'ici rien d'original ) ils demandent contre sa liberté, une rançon ; ce que les petits trafiquants ne peuvent pas trouver. Ces derniers se retrouvent alors en prison pour cinq ans.
Violence et sécurité
.Touristes, nous n'avons pas été témoins de violence. Tout semblait calme autour de nous. Les gens sont aimables et serviables. Il semblerait, pourtant, que règne la peur. Encore plus que dans nos pays, les biens sont protégés, verrouillés, cadenassés. Des grilles devant les immeubles et le moindre petit jardin. Il fallait ouvrir trois cadenas pour accéder , de la cuisine, à la cour intérieur de la maison de Cleia ( la bien nommée ! )
Les "pub"
Les affiches publicitaires sont le lot des villes de tous les pays. J'en ai remarqué certaines qui me paraissaient bien trouvées : telle cette image d'une jeune femme étendue sur le sol, les jambes à la verticale, dépassant le panneau. Je ne sais pas ce qu'elle voulait évoquer mais je conseillerai volontiers la posture à ces dames qui ont les jambes lourdes.
Les routes.
Seul moyen de communication sur des distances moyennes.
La pression de groupes financiers a éliminé le développement du chemin de fer réservé à quelques transports de marchandises. De grosses gares routières monopolisent le trafic des voyageurs. Pour faire 300kms, des cars confortables vous font apercevoir le pays, avec arrêt organisé au super-casse-croûte. Dans l'ensemble, les terres m'ont apparu peu cultivées. Tout le trafic se fait par les routes et autoroutes, très fréquentées. Imaginez l'arrivée dans Sao-Paolo, cette métropole tentaculaire de 17 millions d'habitants.
La traversée des agglomérations et dans certains quartiers des villes, sont installées des séries de ralentisseurs très dissuasifs. Ils peuvent être signalés par des panneaux, mais le confort des passagers et la suspension du véhicule sont très sollicités.
La canne à sucre.
Près d'Araraquera, nous avons visité une plantation de canne à sucre ; de l'exploitation intensive en attendant "le retour du café". A perte de vue le pays est quadrillé par des cultures à différents stades, de la mise en place à la récolte. La coupe se fait après avoir mis le feu qui brûle tout ce qui n'est pas gorgé de sucre. Des machines passent ensuite, pour couper, entasser les cannes qui sont ensuite ramassées dans des gros camions avec deux remorques et emportées à la sucrerie. J'avais vu, en Martinique, des distilleries qui tournaient en circuit fermé, en utilisant les chutes de canne pour chauffer la fournée suivante. Il faudrait une tonne de cannes pour faire un litre d'alcool
PS. : En souvenir du Brésil, j'ai rapporté quelques morceaux de canne avec l'intention de les planter à L'Escoubaïre. Jean-Philippe disait " Tu peux faire pousser n'importe quoi " Le climat, ici, n'est pas tropical, pourtant au bout de trois semaines les plants de canne reprennent.
Le café.
Associer Brésil et café, c'est la tradition. On en boit à toute heure, il est de qualité moyenne, tenu au chaud dans des "thermos" et bien sucré. Dans les restaurant il n'est pas proposé, vous pouvez vous en servir, à volonté, avant de partir. Parfois avec de l'anisette en plus. Pour avoir du bon café, il faut le demander.
Les douches.
Dans ce pays tropical , on se lave souvent. Il n'y a pas d'eau chaude au robinet. J'ai constaté que chaque logement, même en favelle, était équipé, dans la salle d'eau, d'une pomme de douche autochauffante à l'électricité. Ce système me paraît pratique et économique ( il élimine la déperdition d'eau chaude dans les tuyaux ) je n'en ai jamais vu autre part. La distribution de ces appareils a du assurer la fortune de certains hommes d'affaires.
Restaurants "au poids" :
Ce qui est choisi est pesé dans l'assiette et payé à la sortie. Il n'y a pas de distinction de qualité, tout est au même prix. Communément on trouve ce procédé au Canada et aux Etats Unis mais rarement en France.
Les fromages
C'est véritablement une bonne surprise pour les résidents à l'étranger que de se voir servir du fromage frais, type camembert. Sur place, généralement, on ne trouve que des tranches de fromage cuit, plates, blanches, emballées dans du plastique, et d'une fadeur exemplaire. Toutefois, la pénurie suscitant la créativité, j'ai retenu une recette que j'utilise avec bonheur dans les repas que je sers : Etalez sur une tranche de pain, complet de préférence, une couche de fromage, de Hollande, par exemple, garnie d'un carré de pâte de coing, telle qu'en confectionne Anne-Françoise.
En suivant Thérèse
Avec son tempérament bourru mais sensible, Thérèse, en bon "Bélier", prend communément une attitude déterminée : " Qui m'aime me suive ! "
Au cours de nos déplacements ensemble, bien adaptés, dociles, Anne-Marie et moi, nous nous retrouvions souvent en train de la suivre quelques pas par derrière. C'est alors que m'est revenue, de mon enfance, cette chanson que j'ai vu mimer par les jeannettes d'autrefois, au cours de feux de camp :
... Et, tout' les ptit' miss par derrière, en la suivant, disaient tout bas :
Oh yes, how do you do - nous avons vu le singe et le dromadaire !
Oh yes, how do you do - mais le chameau il est là, devant nous !
Le subconscient nous joue des tours car Thérèse ne mérite pas cas cette image qui peut paraître impertinente, mais dont elle ne s'offusque pas, car elle aime le chameau.
Bernadette.
Une personnalité attachante. Elle semble avoir abandonné son "ego" dans le Service des favelles du Brésil. Elle manifeste une énergie étonnante. Elle parle abondamment de ce qu'elle vit et j'imagine que c'est une façon, pour elle, de se recharger. Nous avons découvert son action en même temps que la célèbre "mère Térésa" disparaissait ! Elle reste lucide, attentive, généreuse. Elle ne se laisse pas embarquer, elle intervient avec amour, lucidité, persévérance, compréhension pour les faiblesses de ses protégées. Oui, ce sont les femmes et leurs difficultés qui attirent le plus son attention.
Elle est "habitée". Nous l'avons vue, très entourée par les enfants dont elle s'occupe, mieux qu'une grand-mère.
Yann.
Grand, lourd, tendre et désabusé. Il semble avoir pris racines sur les rives de la favelle de la Villa Prudente. Directeur de l'entreprise Béthania, il gère avec soins les ateliers de menuiserie et d'électricité pour éduquer et faire travailler quelques autochtones. Il partage sa vie entre ses occupations, les cigarettes, la bière, sa voiture, sa femme et sa fille, et Bernadette. Conforme à l'image qu'on nous avait donnée, c'est un bel amateur de camembert.
Les seules acquisitions que nous ayons faites au Brésil furent ces objets en bois construits dans les ateliers de la favelle. J'ai rapporté à mes petites-filles des jolies fleurs et à Boubou, la mascotte de la favelle.
Anne-Marie au Brésil
La photo d'Anne-Marie rayonnante, réussissant à cueillir une banane, illustrerait fort bien ce que fut le voyage en sa compagnie. Si le souvenir de notre frère Jean-Pierre était présent, c'était bien par elle ; il aurait sûrement fort apprécié cette escapade, il aurait été tout à fait à l'aise et comblé.
Retour
:Le 21 09 à JPhi :
Ici les journées sont vraiment belles, on se croirait au Brésil !
Je reprend la barre pour la maison, les Delenne et Flavie s'en sont très bien occupés pendant mon absence.
On m'a notifié ma mise à la retraite, alors je suis prêt à repartir à la prochaine occasion, ou bien retourner méditer dans la favelle de la "Vila Prudente".
Bises Marc