Madame Marteau, l’assistante sociale, m’a recommandé un stage de remise en forme à Valbonne. Après une cure de désintoxication je viens tailler les vignes à l’abbaye de Valbonne.
Par une telle chaleur, c’est du délire !
Pourquoi aligner les vignes au cordeau, alors qu’une fois le raisin pressé elles zigzaguent ? La vie n’est pas droite. Allez, avance, coupe au pas cadencé.
Pauvres ceps gris, racornis ; on se ressemble: on se saigne les veines.
Allez un petit coup du Font des Dames; un délice ce taffetas rubis à 6 euros!
Des dignitaires en soutane noire te surveillent au-dessus des vignes. Ils ont l’air de faire la fête pour un hôte de marque, prince cosaque en toque et manteau zébré d’or. Vont-ils rester longtemps à méditer?
Rire d’un pic-vert courant.
J’en ai marre de trébucher parmi les débris de vaisselle cassée. Non. Je n’irai pas à 17 heures à la permanence de madame Marteau. Tant pis si les cloches sonnent !
Je m’accrocherai comme une grappe violine au fil de fer. Je me baignerai avec les fourmis dans les flaques de soleil. Je me sécherai dans le velours élimé de la mousse. J’essaierai la Croix de sable, grenade rouge tradition à 4 euros. Croix de bois tant pis pour la réinsertion.
Michel Rovet
enlace, incendie l’attente,
la dragonne
elle lape la source
s’y enroule en mousse
la rivière prête son lit bosselé au chemin perdu autant s’allonger sur une cotte de mailles et craindre, la nuit, le réveil des chevaliers.
Michel Rovet
Prier méditer lire écrire
Un semis de violettes s’envolent
Sous le regard du chapiteau
Prier méditer lire écrire
Se tendre au silence de fer
Laisser son bestiaire au vestiaire
Suivre l’arête du rectangle
Une grêlée de cerises perle de rouge le feuillage
Prier méditer lire écrire
L’ombre du chant frôle la voûte
Le bleu l’appelle infiniment
L’enluminure au cassis coule
Doigts tachés à la confiture
Prier méditer lire écrire
Boucles de laine, vie moutonne
Passera-t-elle sous l’arceau du criquet pour gagner le ciel?
Michel Rovet
Personne n’a jamais vu Michel donc les morts n’existent pas.
D’abord il y avait l’herbe et l’herbe était chez Michel et l’herbe était Michel. C’est en lui qu’étaient les chemins et les chemins étaient la lumière des hommes, et la lumière a brillé dans la nuit.
Il y a eu un guide de randonnée envoyé par Michel. Il s’appelait Topo-guide : il est venu attester la lumière des paysages pour tous. Il n’était pas la lumière mais le témoin de la lumière, la vraie qui colporte le bonheur à travers le monde. Ceux qui se fient à lui ne se perdent jamais.
Oui l’herbe s’est faite prairie des plaisirs, et frissonne par les quatre vents parmi nous.
Celui qui marche derrière Michel va être en avant de lui parce qu’il allonge le pas et raccourcit sa peine.
Michel Rovet