Françoise

Les cailloux du Rhône *

Persona *

La cour d’école  *

Exposition galerie : les poissons *

Faire parler les pierres et les cailloux : les sons *

Exposition galerie : les cerises *

Une grande peur : les joies de la navigation de plaisance *





Les cailloux du Rhône




Seule et bien chaussée sous un soleil éclatant, je suis redescendue dans le lit du Rhône y déposer les cailloux que tu m’avais rendus afin de les y faire laver

Pour remplacer ceux que tu t’es approprié, j’en ai choisi de plus beaux encore, bien lisses et sans cicatrice, je vois déjà la couleur des petits poissons quand ils nageront au-dessus

Françoise Duclou

 


PERSONA : la violence de l’attachement non partagé





L’infirmière s’approche de La cantatrice et t’accompagne dans son mutisme, elle partage son silence, elle avance toujours un peu plus près. Elle croit...
Il    n’en est rien, ta cantatrice se tait.
La tension monte, le verre se brise, l’eau bout sur le feu. L’affrontement peut avoir lieu.




La cour d’école


Dans ta cour de récréation, elles chevauchent des chevaux imaginaires, se prenant pour Napoléon. Manifestant une appétence pour le combat de l’autre qu’elles poursuivent pour Le détruire dans tous les recoins de la cour.
Pendant ce temps-là, à quoi pensent les institutrices qui tes voient répéter jour après jour ce scénario?



Françoise Duclou
La chatreuse de Vaibonne, août 2003





Les poissons



Les poissons sont sortis du bocal. Depuis le temps qu’ils tournaient en rond collés les uns aux autres dans un univers bouché.

ils sont sortis, ils l’ont fait

Ils peuvent enfin se déployer, s’allonger, nager à l’horizontale sans limite.

Bien sûr ils doivent rester groupés, leur liberté doit être progressive, ils sont attachés à leur existence précédente, il leur faut s’en nourrir.

Pour mieux s’en défaire, ils y reviennent pour repartir chaque fois un peu plus loin. Déjà! le bleu de leurs écailles a pali, ils sont vraiment très loin


Françoise Duclou

 

Les sons


Comment cuisiner les cailloux du Rhône pour les faire parler? Ingrédients
Se lever de bonne heure pour éviter la chaleur.
Prévoir une paire de chaussures qui adhérent au sol (ne vous accrochez surtout pas aux herbes elles partiraient avec vous).
Un crayon et deux pages blanches suffiront.
Un sac à dos à fond bien solide pour le retour.
Si possible s’affuier les oreilles avant de partir (vous trouverez à la chartreuse Valbonne de très bons conseillers en audition).
Recette:
S’ approcher le plus près possible de la berge du Rhône à Pont Saint Esprit (il n’est pas nécessaire de descendre dans le lit du fleuve: il est beaucoup trop loin).
Choisir des cailloux de plusieurs tailles et de couleurs différentes ils doivent être lisses et bien roulés.
IMPORTANT choisir les plus beaux pour les ramener dans votre jardin ils n’y pousseront pas mais ils feront le délice de vos poissons rouges.
En choisir ensuite deux gros bien fermes, les heurter l’un contre l’autre pour leur faire rendre leur son.
Un frottement répété sera nécessaire, vous entendrez alors un «~j~j~j.~j ».    Saisissez-le bien, faites le revenir lentement, il sera très difficile à reproduire.
Une fois ce «~j~j~j.~j » obtenu, par sécurité, demander à Nicole de le fixer : elle a de l’oreille
Prenez alors dans vos mains une poignée de cailloux blancs et noirs, ce sont les plus nombreux. Jetez les, un à un, sur le monticule de galets qui se trouve à vos pieds.
Pour un résultat plus saisissable jetez les en pluie en une seule fois, ils feront ricochet, répétez l’opération autant de fois que nécessaire. A ce stade de votre préparation une certaine finesse auditive s ‘impose, ce cailloutement en cascade que vous entendez vous allez devoir le communiquer aux convives et Nicole n’est plus là pour vous soutenir.
Pas de panique Si votre préparation n’est pas consommable telle quelle, vous pouvez la laisser mijoter tout l’hiver. Elle sera à point pour le prochain atelier pour être partagée cii pays.
Pour le repas de demain pas de problème vous aurez des lentilles,


FRANÇOISE DUCLOU

 

les cerises


Des cerises étiquetées prêtes à voler sont sorties de leur emballage qui en perd sa forme et sa finalité.

Il déambule se cognant la tête au cadre de tous côtés, mais les cerises sont libres.

Fières de leur nouvelle identité, elles croient que tout le monde les regarde alors qu’il suffit de changer de fenêtre.

Mais quand même leur annuelle saveur nous retient on voudrait la conserver en bouche jusqu’à l’été prochain.

FRANÇOISE DUCLOU

 

Les joies de la navigation de plaisance


Je savais bien que j’aurais du dire non et rentrer par la route.
Je m’étais pourtant dit que jamais plus je n’embarquerais pour plus d’une heure sur un voilier sans avoir vérifié au moins trois sources de météo. Et Marine qui dit: «j’adore ce genre dc situation, je sais qu’on va toujours s’en sortir ». Eux oui, ils savent ce qu’il faut faire, ils tiennent debout. Ils attrapent toujours les bons cordages mais moi, avec mon mal de mer, je suis anéantie. Même si je tente de bouger, c’est pour nie prendre les pieds dans un filin ou recevoir un coup sur la tête. L’essentiel de mes cicatrices me vient de ce bateau. A me regarder les bras on pourrait croire que je n’arrête pas de me suicider. Heureusement que je leur fais confiance et que No est dans le même état que moi, sinon je sauterais à l’eau. La seule chose que je puisse faire c’est de me coucher, essayer de dormir mais avec ce bruit la coque va éclater. Ils n’entendent pas l’orage. Pourquoi ne fait-on pas demi-tour 7 On sort juste de Capbreton alors qu’il reste encore dix heures de navigation avant d’atteindre le Bassin d’Arcachon et ses passes. Avec un temps pareil, je ne vais pas tenir dix heures sans mourir d’épuisement et ce roulis pendulaire qui me met les tripes à l’envers, vite un seau. No est malade aussi. Où est le plaisir 7 Partager un seau!
Tant pis je leur dis que je veux rentrer, j’exige qu’on fasse demi-tour. Pour eux une traversée de plus ou de moins ils font cela tous les ans par plaisir, moi les passes du Bassin, ça ne me fait pas rêver.
Ils nous crient «on a fait demi-tour il faut attendre la marée, c’est trop risqué de rentrer dans le port la mer est trop agitée ».
Maintenant le bateau peut exploser, il y aura bien un gros bateau à moteur pour venir nous chercher.


Françoise Ductou